FRUGES : Rencontre avec Didier Daeninckx : un écrivain qui raconte des choses extraordinaires de gens ordinaires.

Thierry Maricourt, écrivain en résidence dans le canton à l'invitation de la Fédération des foyers ruraux Nord - Pas de Calais et  Didier Daeninckx, auteur de romans noirs, ont de nombreux points en commune. Ils sont  tout deux natifs de la Seine St Denis et de sa banlieue "Rouge", Aubervilliers et la Courneuve, où ils se sont rencontrés après avoir fréquenté le même lycée professionnel. Ils ont mené ensemble les mêmes combats dans les années 80, engagés politiquement, contre le racisme, l'antisémitisme, à la montée du Front national. Didier Daeninckx est un touche à tout de la littérature française, auteur de romans noirs, de nouvelles, d'essais, de bandes dessinées. Issu d'une famille modeste, il prend résolument le parti d'orienter son œuvre vers une critique sociale et politique au travers de laquelle il aborde certains dossiers du moment (la politique des charters, le révisionnisme, etc.) et d'autres d'un passé parfois oublié (le massacre des Algériens à Paris le 17 octobre 1961). Cette enquête historique le conduit parfois à quitter le domaine policier pour un réalisme social. À 17 ans, il devient ouvrier imprimeur, puis animateur culturel, enfin journaliste local, etc. C'est au cours d'une période de chômage qu'il écrit un premier roman qui passe complètement inaperçu, Le second, "Meurtres pour mémoire " (1984) qui, bien avant le procès Papon, place sous les feux de la rampe la dérive sanglante de la manifestation FLN du 17 octobre 1961, est en revanche bien accueilli. Cet ouvrage publié dans la Série noire lui ouvre les portes de la notoriété. Avec Le chat de Tigali (1988) il publie son premier livre pour la jeunesse, une histoire dénonçant le racisme. Dans "La mort n’oublie personne" (1988), considéré comme son ouvrage le plus abouti, il s'éloigne du roman policier et raconte l'histoire tragique d'un jeune résistant condamné pour meurtre après la guerre. Avec Cannibale (1999), il réveille le souvenir de ses "zoos humains" de la IIIe République, en racontant l'histoire des Kanaks exposés comme des animaux dans un zoo lors de l'exposition coloniale de 1931. Dans le même style son dernier roman, publié dans un mois aux éditions Gallimard, évoquera l'histoire des "Métis du Rhin". Il s'agit d'un millier d'enfants nés en Allemagne, dans les années 1920, lorsque l'armée française coloniale composée de Malgaches, de Maliens, d'Antillais, etc. occupait la rive droite du Rhin. A l'arrivée d'Hitler au pouvoir ils furent considérés au même titre que les juifs. Il travaille également  sur l'adaptation d'un de ses romans pour la télévision. Autre trait de la personnalité de Didier Daeninckx, et outre le fait de dénoncer les dérives sociétales et de notre histoire, est de rendre hommage au monde ouvrier. Ses héros sont souvent des gens ordinaires. Auteur d'une bibliographie impressionnante, le prix Paul Féval de Littérature populaire lui a été attribué en 1994 pour l'ensemble de son œuvre. Ses romans sont aujourd'hui traduits dans une vingtaine de pays.